Après le départ de Philippe Leroy pour les Cliniques universitaires Saint-Luc, le CHU Saint-Pierre se cherchait un nouveau directeur général. C’est chose faite. Christophe Soil, ancien directeur de cabinet de Pierre-Yves Dermagne, prend les rênes de cet hôpital bruxellois de 582 lits.
Économiste de formation et maître de conférences en macro et microéconomie à l’ULB, Christophe Soil a été, entre autres, directeur de cabinet du vice-Premier ministre, ministre du Travail et de l'Économie de la Vivaldi, régent de la Banque nationale et directeur général de Perspective.Brussels. Il vient, ce 1ᵉʳ février, de changer de parcours en devenant directeur général du CHU Saint-Pierre. « Mon intérêt pour le secteur hospitalier est antérieur à ma récente prise de fonction, car j’ai été responsable du budget dans la cellule stratégique Santé publique entre 2009 et 2012. Jusqu’à présent, j’ai beaucoup appréhendé ce secteur dans la position de régulateur en répondant à ce type de questions : comment organiser le secteur de la santé et son financement, comment atteindre les objectifs que les pouvoirs publics se fixent… ? Dans ma nouvelle fonction, je découvre ces sujets avec une autre perspective. Je dois changer d’approche, mais je connaissais déjà les problématiques. »
Christophe Soil souligne qu’il a une expertise macroéconomique du secteur de la santé. « Je n’ai jamais travaillé dans un hôpital, mais en prenant la direction générale du CHU Saint-Pierre, je m’inscris dans une certaine continuité par rapport à mon engagement professionnel antérieur. Ce qui structure ma carrière, c’est une aspiration à créer une société dans laquelle tout le monde a accès à un certain nombre de choses. J’estime que chaque citoyen doit avoir accès à la santé, et j’ai le sentiment que le CHU Saint-Pierre symbolise bien ce combat. Tous les hôpitaux le font, mais il y a, à Saint-Pierre, un supplément d’âme. Lorsque j’ai appris que le CHU Saint-Pierre recherchait un directeur général, j’ai ressenti une véritable envie de pouvoir concrétiser mon engagement et contribuer à l’égalité d’accès aux soins de santé. Je me retrouve complètement dans la conviction qui prédomine au CHU Saint-Pierre : en matière de soins, la qualité n’est pas un luxe, mais un droit. »
La réalité du terrain
Quant à la transformation du paysage hospitalier bruxellois, Christophe Soil estime que l’évolution est nécessaire mais doit rester centrée sur l’essentiel : la qualité des soins. « Il y a parfois une distance entre les grandes discussions stratégiques sur l’avenir des hôpitaux et la réalité telle qu’elle est vécue par les médecins et les soignants. Le volet santé du nouvel accord de gouvernement est un vrai challenge pour les hôpitaux bruxellois. La réforme de la nomenclature, les changements d’agréments… vont bousculer les pratiques. Nous devons évaluer l’impact de tous ces changements sur le fonctionnement de notre hôpital. Le CHU Saint-Pierre a la taille et la qualité pour ne pas être remis directement en cause, mais le paysage bruxellois va changer et cela implique de construire des partenariats. Nous ne partons pas de rien puisqu’il y a déjà un groupement en construction avec les Hôpitaux Iris-Sud et un partenariat avec l’Hôpital universitaire de Bruxelles. »
Nous allons devoir réaliser des économies
La situation financière difficile du CHU Saint-Pierre inquiète-t-elle l’économiste qui va devoir bien gérer l’hôpital ? « La situation financière globale des hôpitaux est très tendue. Notre hôpital est dans le rouge. La contribution de responsabilisation (pour les pensions des statutaires, NDLR) a un poids croissant et est problématique pour nos finances. Cette dépense légale n’est pas prise en compte par le budget des moyens financiers. Cela crée une impasse. Nous devrions utiliser la marge que nous pourrions dégager dans nos activités médicales pour payer cette contribution, mais en tant qu’hôpital public, nous ne pouvons pas créer cette marge. Nous sommes face à une véritable impossibilité, étant donné la patientèle spécifique du CHU Saint-Pierre. Plus globalement, la norme de croissance qui a été fixée par le gouvernement Arizona n’est pas vectrice de solutions. Nous allons devoir réaliser des économies. Il faut espérer que la modification de la structuration des soins nous permettra de viser l’équilibre. Ce qui m’inquiète, c’est que chaque hôpital va vouloir augmenter son activité pour pouvoir s’en sortir. Or, l’enveloppe globale est fermée. C’est donc une impasse. »
Une mission de transmission
Le caractère universitaire du CHU Saint-Pierre est une caractéristique qui plaît à son nouveau directeur général. « Il est important pour les médecins de pouvoir mener des recherches à côté de leurs activités cliniques. En tant qu’hôpital universitaire, nous formons de nombreux professionnels de soins. La recherche et la formation renforcent indéniablement l’attractivité de notre hôpital. » Christophe Soil s’inscrit lui-même dans cette mission de transmission, puisqu’il compte continuer à donner cours à la Solvay Brussels School of Economics and Management. « C’est formidable de pouvoir apprendre aux autres et de pouvoir apprendre soi-même. »