En pleine période d’affaires courantes, le budget des soins de santé pour 2025 reste en suspens. Un blocage politique au sein du gouvernement a empêché son adoption ce lundi, plongeant le secteur dans une incertitude inédite. Malgré les avertissements du Comité de l'assurance, les divisions persistent, notamment autour des positions de l'Open VLD et du MR, tandis que les syndicats médicaux s'interrogent sur l'avenir des tarifs pour l'année prochaine.
Nous vous l’avions évoqué lors d'un précédent article sur le sujet : « Le budget des soins de santé sera-t-il pris en otage ou pas ? ». La réponse est malheureusement oui.
En cette période d’affaires courantes, négocier un budget des soins de santé n’est vraiment pas un exercice facile. Cela s’est encore vérifié ce lundi matin. Pourtant, le Comité de l’assurance avait rappelé que l’absence de fixation de l’objectif budgétaire pour 2025 d’ici le 31 décembre 2024 pourrait plonger le système de soins de santé dans une période d’incertitudes.
Blocage politique
Que s’est-il passé ? Pour rappel, les cinq représentants du gouvernement doivent unanimement décider de ne pas mettre un veto. Ce qui n’a pas été le cas, et c’est normal vu les négociations en cours au sein de l’Arizona. Il n’y a pas eu d’unanimité au sein du gouvernement : l'Open VLD a voté « contre » (il n’est pas dans l’Arizona), le MR s’est « abstenu » (il avait un doute sur les estimations techniques, un élément réfuté par l’administration). Enfin, ont voté « pour » Ecolo/Groen et PS/Vooruit.
Décision ou pas ?
Le gouvernement en affaires courantes va donc devoir se mettre d’accord. Il pourrait être dans l’impossibilité de conclure un budget, sauf si l'Open VLD change d’avis. « C’est du jamais vu », nous dit un observateur. « Comme il n’y a pas eu d’accord au sein du gouvernement en affaires courantes, tout s’est compliqué dans l’évolution du dossier. » On nous dit même que « l'Open VLD a refusé que l’on convoque un Conseil des ministres pour en parler. »
Le vote a été fait sur la proposition du Comité d’assurances. Les syndicats médicaux et les mutuelles ont voté « pour » et le patronat s’est « abstenu »... et le gouvernement était donc divisé.
Pour Jacques de Toeuf, Absym : « C’est inimaginable. C’est une première. » Les économies devraient entrer en vigueur le 1er janvier 2025 et étaient nécessaires pour maintenir le niveau de croissance de 2,5% et l'index santé de 3,34% - soit une valeur totale d'environ 2 milliards d'euros.
Du côté du GBO, « on espère que le gouvernement prendra rapidement ses responsabilités en concordance avec la proposition qui a été faite par le Comité d’assurance. C’est vraiment du jamais vu et c’est regrettable. Nous demandons au gouvernement de prendre ses responsabilités. »
Luc Van Gorp, président de la Mutualité chrétienne, déplore l’échec du gouvernement à trouver un accord, qualifiant la situation d'« incompréhensible ». Il avertit que cela met en danger la stabilité des soins et crée une grande incertitude pour patients et prestataires. Il craint que les coûts soient transférés aux patients, avec un risque de déconvention massive et de hausse des suppléments d'honoraires. Le rejet de cette proposition compromet également le temps nécessaire pour préparer correctement les économies, certaines devant entrer en vigueur dès le 1er janvier. Par ailleurs, la loi exigeait un budget d’ici au troisième lundi d’octobre, une obligation qui n'a pas été respectée selon Van Gorp.
Du côté du Cabinet , dans un communiqué, le ministre Frank Vandenbroucke a déclaré : « Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour remettre le budget sur les rails. C’est pourquoi je demande au Premier ministre de rassembler le kern en urgence. Il faut prendre ses responsabilités à cet égard. »
Cependant, au 16 rue de la Loi, on se tourne vers le formateur Bart De Wever. "Le budget de l'INAMI fait partie du budget global pour 2025. C’est un exercice sur lequel le formateur travaille actuellement. Le Premier ministre en a informé le formateur, et le gouvernement démissionnaire ne va pas interférer dans son travail", réagit le porte-parole de De Croo.
Libérer les médecins de l’accord ?
« S’il n’y a pas de budget avant la fin de l’année, cela veut dire que l’on commence l’année prochaine avec les douzièmes provisoires pour les médecins, les hôpitaux... », ajoute Jacques de Toeuf.
Les syndicats médicaux pourraient donc devoir casser l’accord médico-mut... Sans quoi les médecins devraient travailler au tarif 2024. Pour rappel, les syndicats médicaux ont jusqu’au 15 décembre pour casser (ne plus suivre) cet accord... avec le risque que les tarifs soient fixés par le gouvernement. Cela ne serait pas une bonne nouvelle pour les médecins et les hôpitaux non plus...
Voici une semaine, le budget santé 2025 avait été discuté au sein du Comité de l'assurance de l'INAMI et avait obtenu une majorité de 14 voix pour, avec 1 voix contre et 6 abstentions.
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