Certains conseils médicaux s’interrogent sur les modalités du partage de l’avance qui leur est octroyée à juste titre parce que tous les éléments à prendre en compte pour le calcul ne sont pas disponibles. D’un autre côté, on n’en est plus là parce que à mon avis cette avance ne représentera pas grand-chose et qu’il est impératif, de se préoccuper et de préciser les modalités pour rémunérer équitablement les prestataires de soins pour les activités dites supplémentaires, pour le risque, et la complexité des actes pendant cette période plutôt que de perdre trop de temps à réfléchir au partage de la part du milliard attribuée au médecin.
Une chimère à cause du plafond de 65%.
En effet beaucoup n’ont pas saisi les nuances de la circulaire de l’INAMI relative au Milliard et qui en plus de rappeler que c’est une avance qui est un vrai prêt (et dont la vocation initiale était d’éviter la faillite des hôpitaux) précise que « les montants facturés pour les mois de mars, avril et mai, ne peuvent pas, globalement, par hôpital, dépasser 65 % de la partie INAMI des honoraires facturés, après rétrocession de la partie pour l'hôpital, dans la période correspondante de 2018 ».
De ce fait, si on tient compte du fait que les hôpitaux ont facturé un demi-mois de mars normalement, et un mois de mai quasi normal, pour avril et une partie de mars ils ont néanmoins facturés l’activité covid mais aussi l’activité résiduelle (l’urgent et le nécessaire) qui peut être estimée à 30% de l’activité habituelle. La somme de ces 3 mois, avoisinerai 65% de la facturation de 2018, ce qui ne laisse pas de place à une grande avance ! La limite des 65% était juste insultante vis-à-vis des médecins et j’espère que les conseils médicaux ne perdront pas de temps à discuter de cette étape, alors qu’il est devenu urgent de se pencher sur l’étape suivante, le paiement et non le prêt.
Il y a un réel besoin d’équité et de valorisation adéquate. Le soutien aux hôpitaux semble faire l’unanimité, autant que l’est le refus théorique d’une compensation pour les soignants ! Je peux comprendre qu’il ne soit pas plus légitime de soutenir les prestataires de soins que les autres citoyens qui ont aussi souffert de la crise, mais si on pense qu’il faut soutenir les hôpitaux pour leur mission et indirectement assurer la rémunération des soignants salariés, peut-on dissocier les hôpitaux de leurs prestataires indépendants ? Cela n’est pas légitime en effet, tout comme il n’est pas plus légitime de différencier les indépendants hospitaliers des extra-hospitaliers, qui reçoivent depuis peu, une intervention financière pour couvrir les frais engagés pour les mesures de protections, par patient, ce qui revient indirectement à une valorisation du travail.
Chaque prestation se retrouve compliquée, ralentie par l’épidémie (tri, espacement, trajets de soins...) et cela continue à ce jour. Ce travail, le risque et la disponibilité méritent une rétribution, qui n’est pas une compensation, au même titre que la garantie offerte pour le fonctionnement des hôpitaux et la rémunération de leurs salariés.
Quelles modalités pour les indépendants hospitaliers ?
J’évoquais il y a quelques mois le besoin de prendre en compte la disponibilité, mais cela est resté sans suite. Peut-on alors parler d’une prime de risque ? Une prime de risque ou de disponibilité répondrait je pense à la demande du terrain. Pour répondre à la question, il ne faut pas oublier que les hôpitaux auront une plus grande part du gâteau pour garantir le salaire de leur personnel, et qu’ils ont déjà pu établir les surcoûts dus à l’épidémie, alors que ce travail ne fait que commencer pour le corps médical.
Il faudrait que l’INAMI et le corps médical soient créatifs pour prévoir des modalités nouvelles qui assurent une équité et une juste valorisation du risque pris par les médecins pendant cette période. C’est comme cela que l’on prépare l’avenir. Ces modalités s’inscriront peut-être dans un projet de soins qui consiste à proposer des rétributions en partie forfaitaires pour des fonctions et des missions qui viennent compléter le paiement à l’acte qui ne peut plus être l’unique système.
Au vu des sommes déjà engagées pour l’ambulatoire, le même budget aurait été engagé si l’on accordait un supplément de 10 à 20% par prestation, plafonné et/ou limité aux soins nécessitant la présence du soignant, ce qui concerne quasi tous les prestataires, et tous les types de pratique (salarié, seul, en groupe, en pool, en intra ou extra-hospitalier). Cela facilite la reconnaissance de la propriété de l’honoraire et de la destination de l’acte, et prend en compte la nécessaire rétrocession qui lui est appliquée dans les hôpitaux,
Il ne faut pas perdre de vue la suite
S’il était grand temps de passer à cette étape cruciale de la rémunération pendant cette crise, il ne faut pas perdre de vue la suite qui est encore plus fondamentale. La covid est un épisode grave mais heureusement transitoire et les enjeux des réformes des soins entrepris avec Maggie restent d’actualité ( la réforme de la Nomenclature, du BMF, la mise en réseau des hôpitaux etc. ) et il ne faut pas perdre cela de vue.
Enfin, ces modalités différentes de soutien aux médecins et aux hôpitaux ouvrent la voie à une réflexion profonde sur les honoraires et la nécessité de clarifier la part des honoraires revenants aux médecins ainsi que la part qui devrait contribuer structurellement au financement des hôpitaux. Le sous-financement hospitalier que l’on connaît ne peut être résolu sans un sacrifice de part et d’autre pour aboutir à une situation plus saine, plus transparente et plus équitable. Ce travail de « nettoyage » permettra aussi de clarifier pour les médecins- assistants, leur production, leur rétribution et le prix à payer pour leur formation.
Cette crise nous aura rappelé que la rétribution actuelle des médecins hospitaliers ressemble plus à une lasagne qu’à autre chose. Il est temps d’innover et de préparer l’avenir sans trop s’attarder sur le sars-cov-2 …
Derniers commentaires
Freddy GORET
03 juillet 2020Bien vu
La direction des hôpitaux va tout faire pour s emparer de cette avance et va profiter de l affaire « covid » pour ponctionner encore un peu plus les honoraires des prestataires de soins
Les médecins sont devenus des moutons prêts pour une petite tonde supplémentaire
A quand une bonne grève générale comme au temps de « Leburton » ...