Comment les hôpitaux vont-ils pouvoir se transformer et évoluer avec les moyens financiers qui sont à leur disposition aujourd’hui ? La valeur des données de santé, notamment, va-t-elle participer à ce financement ? Ce vaste débat a été abordé au Festival Imagésanté cette semaine
Le Festival Imagésanté à Liège a ouvert ses portes avec un débat sur l’avenir des hôpitaux. Cette édition 100% digital, installée à la Cité Miroir, a permis d’entendre plusieurs directeurs d’hôpitaux et autres acteurs sur l’hôpital sur l’avenir du financement des soins de santé. A ce stade, Paul D’Oetreppe, directeur de la Clinique Saint Luc de Bouge et président de l’ABDH a conscience que « tous les hôpitaux ne sont pas égaux face aux avancées technologiques et à la personnalisation des soins de santé. » Toutefois, pour que cette évolution avance dans le bon sens, il l’affirme : « Nous aurons besoin d’un autre type de financement. On devra financer les résultats finaux et pas seulement la structure. »
Un discours que partage Julien Compère, administrateur délégué du CHU de Liège : « Les professionnels de la santé sont convaincus de la nécessité d’intégrer les avancées technologiques. Toutefois, si on leur demande de travailler à des solutions de télémédecine, il faut leur dégager du temps pour ces nouvelles technologies. Nous avons besoin des moyens humains et financiers. On ne peut pas oublier le goulot d’étranglement qu’est la pénurie de personnel. »
Démontrer la plus-value de la technologie
Pour Melchior Wathelet, CEO de Zorgi (qui offre aux hôpitaux un soutien technologique) face à ces défis, il faudra tenir compte de la disponibilité des médecins et autres acteurs de soins: « Il y a plus de 350.000 applications santé aujourd’hui. Comment on les rembourse ? Comment on les finance ? Comment les données sont intégrées dans le système de l’hôpital ? Toutes ces questions de confidentialité, de cadres réglementaires...n’ont pas une réponse claire. On tâtonne encore un peu en la matière. »
Pour lui, « le personnel soignant est prêt à cette transformation et il est demandeur de nouvelles solutions pour autant que cela soit cadré. Mais il attend surtout que cela serve à quelque chose au patient et au médecin. On doit démontrer cette plus-value financière mais aussi en matière de soins, de temps, de confort. »
Il est conscient que le défi d’une bonne intégration dans l’hôpital se situe à ce niveau : « On essaie de dialoguer avec les médecins pour améliorer cela, mais on doit faire face aux lourdeurs administratives, à l’impossibilité de notre système de financement de soins de s’adapter aux évolutions technologiques. »
Il croit aussi en l’impact des données dans le débat sur le financement : «Aujourd’hui, toutes ces données pourraient être utiles de manière anonymisée . Les hôpitaux ont à leur disposition avec ces données, un outil de recherche, une possibilité d’améliorer leur financement et leur qualité. Il faut donc repenser le système. Les données doivent être un vecteur de changement. »
Un financement adapté à la personnalisation
Pour Hadewig-Vic De Corte, CEO de la Clinique Saint-Jean, la façon de voir le patient par l’hôpital et le médecin va évoluer : « A la clinique Saint-Jean, on personnalise l’expérience patient. On ne voit pas le patient comme « une maladie » mais comme une personne à part entière. On fait évoluer la culture de l’hôpital. »
Pour elle, le financement doit changer en ce sens : « On doit adapter les processus de financement pour que l’on puisse mieux soigner le patient dans sa globalité et pas seulement pour la maladie pour laquelle il vient. Il faut une approche plus holistique dans la future réflexion sur le financement. Cela aidera aussi à l’intégration des nouvelles technologies auprès du patient et des soins qu’il recevra. »
Les données « portables » du patient
Une réflexion que partage Philippe Kohl, CIO du CHU de Liège: « L’ensemble des données doivent suivre le patient et être à disposition du médecin spécialiste et puis du médecin généraliste. Tout cela nécessite une refonte du financement parce qu’à l’heure actuelle, nous sommes financés de manière ridicule pour cette réflexion. A cela, il faut ajouter l’importance de la confiance du patient dans le traitement des données qui va répondre aux prescrits du GDPR. Les données sont là pour améliorer la qualité des soins du patient et il faut lui expliquer. »
Cette réflexion et d’autres feront partie d’un webinar ce 30 mars 2021 (17h00-19h00) organisé par l’ABDH et l’ABSyM sur la "Présentation de l'étude Antares : analyse comparative des méthodes de financement des hôpitaux et perspectives d'avenir pour la Belgique" où Pascal Selleslagh, journaliste du Spécialiste sera un des modérateurs.
> (Re)voir le débat sur l'hôpital de demain