En réaction à la publication par la Mutualité chrétienne de la liste des médicaments les plus chers utilisés par ses affiliés, et au lien tissé avec le rapport récemment publié par le Centre Fédéral d'Expertise des Soins de Santé (KCE), pharma.be, l'organisation qui regroupe en son sein plus de 125 entreprises pharmaceutiques innovantes actives en Belgique, appelle vendredi, dans un communiqué, à une analyse plus large avec des données plus récentes et complètes afin d'évaluer le rapport coût-efficacité des médicaments innovants pour le traitement contre le cancer.
De 2015 à 2020, les dépenses nettes consacrées aux médicaments innovants qui bénéficient encore de la protection d'un brevet ont diminué de 1%. Dans le même temps, les dépenses pour les médicaments plus anciens ayant perdu leur brevet ont augmenté de 49%.
Aucune perspective du médecin ni du patient
Environ un homme sur trois et une femme sur quatre se verront diagnostiquer un cancer avant leur 75e anniversaire. Mais la perspective du patient n'est pas abordée dans le rapport. La composante humaine est absente. Pourtant, du point de vue du patient, quelques mois de vie en plus font bel et bien une grosse différence. L'innovation donne par ailleurs de l'espoir et offre aussi des alternatives au médecin, pour qu'en cas de gros effets secondaires, il conserve des options thérapeutiques. L'analyse du rapport coût-efficacité du KCE ignore donc totalement une grande partie de l'écosystème oncologique.
Une image biaisée de la réalité
Le rapport du KCE fait une analyse économique coûts-avantages des médicaments innovants pour le traitement du cancer. Mais ce rapport est basé sur des données dépassées et incomplètes. L'évaluation remonte jusqu'à dix-sept ans en arrière et ne tient pas compte des innovations des quatre dernières années, dans un domaine de recherche à l'évolution rapide.
C'est pourtant crucial en raison de l'efficacité des traitements les plus récents. Pour neuf des douze types de cancers analysés, le rapport ne s'intéresse en outre qu'à des patients qui se trouvaient déjà au stade IV (cancer généralisé) au moment du diagnostic. Lorsque la probabilité de survie à ce stade est prise comme principal paramètre d'efficacité, cela peut mener à de mauvaises conclusions. L'évaluation des rapports coût-efficacité est en plus principalement basée sur des analyses britanniques, ce qui ne tient pas du tout compte des spécificités du système de santé belge.
L'innovation à l'origine d'une évolution spectaculaire
Notre pays occupe traditionnellement une place forte de la recherche et du développement. La Belgique comptabilise le deuxième plus grand nombre d'études cliniques en Europe. Le résultat de cette position est un accès plus rapide à des innovations médicales et de nouveaux médicaments. Et cela donne des chiffres encourageants. Pour certains types de cancers, l'évolution est même tout bonnement spectaculaire. Le taux de survie global, cinq ans après le diagnostic, des personnes souffrant d'un cancer du sein a augmenté de 85% à 91% entre 2000 et 2019. Le nombre de patients atteints d'un cancer du poumon qui sont encore en vie un an après le diagnostic est dix fois plus élevé qu'en 1995. Pour les cancers de la peau avec métastases, le nombre de patients encore en vie cinq ans après le diagnostic a décuplé, passant de 5 à 50%. Ces avancées sont en grande partie dues à de nouveaux médicaments.
L'impact économique de l'innovation
L'Europe estime l'impact économique du cancer à plus de 100 milliards d'euros par an pour tous les États membres de l'Union. Malgré le fait que le cancer reste la deuxième plus grande cause de décès en Belgique, l'espérance de vie de la population active augmente sensiblement. Ce gain de vie est attribué à 73% aux médicaments innovants. Cela s'est traduit par 5,4 milliards d'euros de plus en contributions à l'économie, rien qu'en 2017. Mais une approche purement économique de l'innovation dans le secteur des soins, sans tenir compte des aspects humains, est trop restrictive. Cela mène à des conclusions unilatérales.
Pour Caroline Ven, CEO de pharma.be « Le rapport du KCE ne doit pas déboucher sur des conclusions hâtives. Cela serait néfaste pour les soins de santé dans notre pays. La Belgique compte le deuxième plus grand nombre d'études cliniques en Europe. Ces études donnent un accès plus rapide à de nouveaux médicaments pour le patient. Freiner l'innovation pour le traitement du cancer est donc loin d'être une bonne idée, surtout en ce moment, alors que toute une série de percées majeures sont en cours. Les immunothérapies révolutionnaires pour la lutte contre le cancer ont déjà montré leur valeur ajoutée. Il faudra bientôt y ajouter la thérapie génique et les traitements dits ‘cellulaires', des innovations dont on attend aussi qu'elles entraînent une augmentation considérable de l'espérance de vie du patient. Le secteur appelle dès lors aussi à un dialogue constructif et prospectif sur la lutte contre le cancer en Belgique. Une politique de lutte contre le cancer forte et innovante est et reste absolument nécessaire, du point de vue humain comme du point de vue économique. »
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