Antares - consulting a piloté récemment une session de débats consacrée à l’hôpital de jour (HJ). Il en ressort clairement que les esprits sont mûrs pour réduire la voilure de l’hospitalisation classique, tout d’abord en faveur de l’HCJ (hospitalisation chirurgicale de jour), ensuite de l’ensemble des HJ. Il faudra cependant lever plusieurs obstacles. Il y a urgence, ceux qui ne s’adapteront pas seront pénalisés.
Benoit Collin, administrateur général de l’INAMI, s’est montré un partisan inconditionnel de l’élargissement de la liste A. Il constate qu’on en parle depuis 20 ans, et que rien n’a changé. L’hôpital de jour est corsetée dans une sorte.de camisole de force alors qu’elle devrait être la norme de premier choix. Une comparaison internationale le démontre. Les USA ont réformé leur modèle de financement il y a 40 ans, faisant passer la chirurgie ambulatoire de 20 à 60% des admissions . Nos proches voisins ont fait de même. En Belgique, la croissance des dix dernières années est due à l’augmentation du nombre des forfaits des conventions INAMI (HJ médicale), l’hospitalisation chirurgicale de jour (HJC) évoluant seulement de 15 à 18 % des admissions totales. Mr Collin ne mâche pas ses mots : « à l’égard d’un hôpital qui n’accomplit pas assez vite le virage ambulatoire, nous établirons une liste B assortie de mesures punitives »
Partisan encore plus énergique de l’hôpital de jour, le Dr Gilbert Bejjani (secrétaire général ABSyM, et membre de l’ABDH association belge des directeurs d’hôpitaux) prend exemple sur la Clinique de la Basilique (Ganshoren Bruxelles) qu’il dirige. L’HJ est restée sur le même campus, le cadre de travail reste présent, le fonctionnement est couvert par les moyens financiers existants garantissant la viabilité financière de l’institution. La population elle-même est demandeuse d’un retour plus rapide à domicile après hospitalisation. Les autorités doivent soutenir ce projet de façon plus ambitieuse. Il faut tenir compte, dans le nouveau modèle, du vieillissement de la population.
Un financement à l’activité.
Le Dr Bejjani souhaite voir sanctionnés les hôpitaux qui freineraient le changement. Il plaide, pour l’HJ, en faveur d’un prix de journée qui serait plus élevé que la valeur à 100% du prix de journée classique. « Le financement sur base de lits justifiés est totalement dépassé et peu transparent. La variation interhospitalière est déraisonnable, due au modèle appliqué de paiement d’un prix moyen selon le casemix d’APRDRG de chaque hôpital. Nous devons aller vers un financement basé sur chaque pathologie et l’activité, global et orienté vers le patient. Chacun recevra sa juste part d’une enveloppe à partager ». « Le monde hospitalier est frigorifié devant le changement. C’est difficile à comprendre puisque chaque hôpital sera rétribué selon son activité ».
« Travailler plus en HJ permet aussi de réduire les effets du manque de personnel, qui bénéficiera d’oxygène complémentaire (travail de jour 5/7) et d’amélioration de son bien-être ».
« S’il faut d’autres mesures qualitatives en aval de l’HJ, il faudra établir des accords transmuraux avec la première ligne incluant les aspects post-opératoires, le follow-up, la télémédecine, … , pour garantir la qualité et éviter les réadmissions intempestives de patients».
Le dirigeant de l’ABSyM réfère à une récente réglementation sur les hôpitaux psychiatriques en Israël, où la réadmission sera lourdement pénalisée. De nombreuses applications mobiles y sont développées pour réduire les risques et contribuer aux règles.
La mesure de la qualité est la clé de la fixation du prix d’un séjour en HJ, avec l’identification de la pathologie. « Prenez l’Allemagne qui dispose du meilleur centre mondial de chirurgie du cancer de la prostate. Il n’est pas le seul évidemment à offrir une qualité exceptionnelle … parce que la qualité est mesurée en continu. En Suisse, la qualité des services influence les paiements. Nous devons évoluer vers un tel modèle : des centres de qualité payés au juste prix ».
« En tant qu’hôpital, tendons la main à la première ligne. »
Selon le Dr Gilbert Bejjani, “nous avons largement saupoudré les moyens financiers entre les hôpitaux. Des milliers de lits inoccupés, des services de garde de 24h ayant une activité très réduite, des maternités réalisant un accouchement par 24 h, un nombre élevé de lits intensifs occupés par des patients ne nécessitant pas ces infrastructures, cela représente des coûts énormes et un gaspillage tout aussi choquant ».
Benoit Collin le rejoint. « Il y a des services d’urgence qui reçoivent en moyenne 1,5 patient par nuit. Le personnel s’endort avant d’avoir à intervenir ! » « En Belgique un problème complémentaire vient du fait que les soins sont organisés sans ancrage dans la communauté proche ». « Les généralistes se plaignent d’un détournement des patients vers l’hôpital, mais ils ne sont pas toujours eux-mêmes en état d’accueillir les patients ». Les pays qui ont évolué vers une première ligne de qualité ont organisé leur modèle hospitalier en collaboration avec la première ligne et avec les communautés locales ou régionales.
Le Dr Bejjani conclut : « En tant qu’hôpital, tendons la main à la première ligne. A défaut, la première ligne définira le budget hospitalier comme résiduel. Travailler avec les autres lignes est une opportunité et une nécessité pour les hôpitaux ».
Il n’y a pas, selon lui, de réelles difficultés financières à basculer vers le nouveau modèle d’hôpital de jour, pour autant que le financement soit convenable. Aujourd’hui, des moyens sont dédiés à des activités qui sont jusqu’à 5 à 10 fois surpayées, comme p ex les séjours pour chirurgie du canal carpien. Ces ressources doivent être rassemblées et redistribuées.
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