Le géant pharmaceutique suisse Novartis a lancé lundi sa "loterie" controversée pour tirer au sort 100 bébés malades auxquels fournir gratuitement son très coûteux traitement Zolgensma, qui a fait la Une de la presse belge avec l'affaire de la petite Pia. L'entreprise dit avoir entendu les critiques émises sur la technique utilisée pour désigner les bénéficiaires et se dit prête à évaluer les propositions alternatives de médecins, organisations de patients ou autorités en la matière.
Le Zolgensma, thérapie génique en dose unique, traite l'amyotrophie spinale proximale de type 1 (amyotrophie spinale proximale liée au gène SMN1 ou "SMA"), une maladie rare qui touche les tout-petits. Médicament "le plus cher du monde", il est commercialisé aux Etats-Unis à un prix atteignant près de deux millions d'euros. En Europe, il fait l'objet d'une demande d'autorisation de mise sur le marché auprès de l'Agence européenne des médicaments (EMA), qui n'a pas encore abouti.
Concernant le tirage au sort organisé, les cinq ministres de l'initiative Beneluxa pour un accès durable et abordable aux médicaments, dont Maggie De Block, indiquent avoir de fortes réserves face à ce qu'ils qualifient de "loterie de la vie". "Le haut niveau d'incertitude et la non-transparence de l'approche sont tout simplement inacceptables. Cela démontre l'absence d'engagement sincère envers les patients et ne fait qu'augmenter la détresse dans laquelle les familles concernées sont plongées en leur donnant de faux espoirs. Si l'on réduit le sort d'un patient à un billet de loterie, on tire un trait sur la dignité humaine et les valeurs morales", estiment les ministres compétents de ces cinq petits pays (Pays-Bas, Luxembourg, Autriche, Irlande et Belgique).
Novartis se défend face aux critiques, arguant que sa "loterie" aidera les parents de 100 enfants de par le monde. L'entreprise pharmaceutique dit, via le Country Manager Benelux de sa filiale AveXis, Karel Fol, vouloir discuter avec les parties prenantes pour répondre aux préoccupations exprimées. "Nous avons entendu les craintes des ministres, et nous avons également entendu les remarques des familles de patients", explique M. Fol. "Nous les avons entendues et nous allons prendre des mesures. Nous allons discuter avec des organisations de patients, des médecins et les autorités et analyser leurs propositions. Si elles sont conformes aux valeurs du programme, nous les évaluerons afin d'ajuster notre façon de procéder."
Novartis indique ne pas pouvoir actuellement produire davantage de doses de Zolgensma à un prix moindre par manque de capacités de production, puisqu'il n'existe encore qu'une seule unité de production. "Le problème initial est un manque de capacités. C'est la première fois que nous mettons sur le marché une thérapie génique au processus de production aussi complexe." AveXis est en train de mettre en place deux unités supplémentaires de production, mais celles-ci doivent encore passer un processus d'agrément. Cela pourrait être réglé pour 2021, selon l'entreprise. Avec ces trois installations, elle estime qu'elle pourra répondre à la demande.
En attendant, le programme de Novartis débute donc lundi. Huit enfants seront tirés au sort ce lundi, puis quatre toutes les deux semaines afin de recevoir le traitement.
Lundi, les autorités allemandes ont indiqué qu'elles ne s'opposeraient pas à cette méthode si l'un des enfants tiré au sort est allemand, même si ce traitement n'est pas encore approuvé en Europe.
La SMA toucherait entre 8.000 et 10.000 personnes à travers le monde. Novartis n'a pas révélé le nombre d'inscrits à son système de loterie. Si le pays tiré au sort autorise le Zolgensma à titre exceptionnel, l'enfant le recevra dans les semaines suivantes, selon Novartis.