Le Conseil d'État a reconnu la légitimité et la proportionnalité d'une vaccination obligatoire des professionnels de la santé. Dans un avis rendu le 24 décembre en assemblée générale et évoqué jeudi par la RTBF, il pointe toutefois une série d'éléments qui devront être adaptés.
Au terme de travaux menés dans un climat politique tendu, le gouvernement fédéral s'est accordé en novembre sur un dispositif imposant la vaccination des professionnels de la santé et prévoyant le retrait de leur visa pour exercer, ainsi que la résiliation de leur contrat ou la suspension au bout d'une période transitoire. Cette phase transitoire doi t en principe s'achever le 1er avril.
L'avant-projet de loi "tend à protéger non seulement la santé des patients mais aussi celle du professionnel des soins de santé et ce, afin de maintenir le système de santé publique intact et opérationnel autant que possible". "Il n'est pas contestable que les objectifs ainsi poursuivis sont légitimes", estime le Conseil d'État.
Mais un telle mesure doit se fonder sur des données scientifiques, précise-t-il. La circonstance que celles-ci sont encore incomplètes et peuvent changer "n'empêche pas que des mesures soient d'ores et déjà prises pour parer aux risques pesant sur la santé publique, conformément au principe de précaution". Dans le cas présent, l'obligation de vaccination des professionnels de santé se "fonde sur des avis et des recommandations d'institutions spécifiques", constate-t-il avant de se rallier à la position du gouvernement: "Une obligation vaccinale ciblée est un moyen nécessaire et proportionné dans l'objectif de protéger la population qui ne peut & ecirc;tre atteint d'une manière moins radicale".
Le Conseil d'État "n'aperçoit pas à ce stade (...) de motifs évidents de mettre en doute la proportionnalité de la restriction au droit à l'intégrité physique qu'emporte l'avant-projet", conclut-il. Il insiste toutefois sur la nécessité de prendre en compte "en permanence" les données scientifiques disponibles dans le cadre d'un processus "minutieux, transparent et argumenté".
L'avis contient toutefois une série de remarques. Un avis du Conseil national du travail, c'est-à-dire des partenaires sociaux, est requis. Des adaptations doivent également être adoptées pour le cas des ambulanciers-secouristes afin de résoudre un problème de compétence. Le Conseil d'État demande aussi que soient mieux justifiées les raisons pour lesquelles certaines catégories ne sont pas concernées par le projet de loi alors qu'elles sont également en contact avec un public vulnérable (personnel d'accueil, d'entretien, volontaires, étudiants en formation, etc.)
L'accord politique obtenu après de longues heures de négociation repose sur un système inhabituel de suspension et de résiliation éventuelle du contrat de travail pour les soignants qui refuseraient de se faire vacciner. L'avis invite le gouvernement à régler plus clairement le cas de l'indemnité de préavis qui serait due.
Le gouvernement avait prévu une entrée en vigueur le 1er janvier et une période transitoire expirant le 31 mars durant laquelle les soignants non vaccinés pourraient toujours exercer, à charge pour eux de se faire vacciner dans l'intervalle s'ils veulent continuer à exercer. Or, le texte devra encore passer au gouvernement et sera sans doute adapté sur certains points. Une entrée en vigueur rétroactive n'est pas prévue et le délai de trois mois prévu non seulement pour permettre au personnel de se vacciner mais aussi de le sensibiliser ne pourra être tenu. Si ce délai était raccourci, le Conseil d'État demande qu'il soit toutefois "suffisant" pour réaliser ces deux objectifs.