Avec 792 patients COVID-19 et 1000 patients estimés pour le 10 décembre 2021, les soins intensifs (SI) sont saturés, non seulement parce que le nombre de patients est si élevé, mais aussi parce que 200 lits de SI ont dû fermer en raison de l’indisponibilité parmi le personnel soignant. Dans un communiqué le GBS, préoccupé par cette situation, analyse les causes de cette crise dans les hôpitaux.
Inutile de prétendre que cette saturation et l’arrêt des soins sont totalement inattendus. Plusieurs signes avant-coureurs annonçaient cette crise. Nous sommes extrêmement préoccupés par cette situation. Il est temps d’analyser les causes de cette crise dans les hôpitaux et de trouver des solutions structurelles. Plusieurs préoccupations doivent être prises en compte sans tarder pour garantir non seulement l’avenir mais à court terme la continuité de nos soins de santé :
1. Première préoccupation : la durée des études en soins infirmiers est passée de 3 à 4 ans afin de former des infirmiers « polyvalents » qui, en temps de crise, peuvent travailler dans différents services. Or, que constatons-nous ? Les infirmiers SIAMU et les infirmiers de salle d’opération ou en anesthésie n’ont pas les mêmes compétences. Des intensivistes ont démontré que la qualité des soins dans les nouvelles unités de SI n’est pas aussi bonne que dans les USI.
2. Deuxième préoccupation : le personnel soignant est le maillon faible de la chaîne de la productivité des soins. Les membres du personnel infirmier, à l’instar de nombreux autres parents, doivent s’occuper de leurs enfants suite à la fermeture des classes et des mesures de quarantaine. La quarantaine ne s’applique pas aux soignants asymptomatiques, ceux-ci continuent à travailler en suivant les mesures de protection. On peut s’interroger sur le vécu de cette règle, quand le soignant quitte son lieu de travail et rentre chez lui. La fatigue, la crainte de la maladie, le burn-out, mais surtout ce sentiment d’impuissance devant la maladie qui touche de plus en plus de jeunes, éloignent les soignants de l’exercice de leur profession.
3. Troisième préoccupation : de façon structurelle, le nombre insuffisant d’infirmiers au chevet des malades dans les hôpitaux. Selon l’OCDE, il y a trop peu d’infirmiers par unité de soins. La réponse de l’autorité de santé est de déléguer des tâches à de nouveaux prestataires de soins comme les aides-soignants. Mais en temps de crise, c’est du personnel qualifié et flexible dont on a besoin.
4. La quatrième préoccupation est le lockdown des soins et la fermeture de l’hôpital de jour chirurgical.
« Toutes les thérapies nécessaires (à la vie) en cours (chimiothérapie, dialyse, ....) ou la réadaptation nécessaire doivent être poursuivies. Les hôpitaux sont des lieux sûrs pour poursuivre ces soins Les soins COVID seront clairement séparés des soins réguliers. » 1
5. Cinquième préoccupation : l’arrêt complet des hôpitaux sans distinction de l’impact COVID ni prise en compte d’alternatives
La « réadaptation nécessaire » et « les thérapies nécessaires (à la vie) en cours » doivent être poursuivies. Les unités de soins et les quartiers opératoires ferment, sauf urgences (vitales). Le personnel de la chirurgie de jour est mobilisé pour des soins COVID-19. Bref, la médecine spécialisée est en quarantaine pour 15 jours. Ces 15 jours suffiront-ils ? Quand l’activité pourra reprendre après ce lockdown le personnel soignant devra récupérer. Où est la médecine extrahospitalière ? Que faire dans les cabinets de consultations ? En quoi l’imagerie médicale et le laboratoire sont-ils impactés ?
6. Enfin, la dernière préoccupation, et non des moindres, est le manque d’anticipation et de vision à moyen et long terme.
Il est urgent de développer une stratégie structurelle pour les hôpitaux. D‘une part les décisions pour les quartiers opératoires sont prises dans l’urgence et sans préparation. Ensuite elles sont immédiatement communiquées aux hôpitaux pour mise en œuvre. Les médecins spécialistes en première ligne responsables de la prise en charge apprennent l’arrêt par voie de presse ce qui les prive de toute possibilité d’anticipation et communication appropriée vis-à-vis des patients.
Comment les chirurgiens pourront-ils récupérer le retard des soins ? Quel est l’impact économique sur le soignant, le médecin et le gestionnaire ? Quel est l’impact sur la santé publique ? Quel est l’impact sur le patient et sa confiance dans notre système de santé ?
La crise sanitaire qui se cristallise au travers de la saturation de nos hôpitaux ne permet pas d’assurer des soins corrects. Ce sont les patients et les médecins et plus particulièrement les médecins spécialistes qui en souffrent. Ils ont choisi ce métier pour soigner la population, avec leur compétence, technicité, empathie, humanisme. Malheureusement la crise sanitaire oblige les prestataires de soins à être les spectateurs de décisions et d‘ attitudes parfois peu responsables qui conduisent au lockdown de nos hôpitaux. Les médecins, le HTSC et les soignants sauvent ce qu’ils peuvent. On ne peut que les remercier.
Derniers commentaires
Yves Van Crombrugge
06 décembre 2021Article très réaliste. La covid, peste des temps modernes , l'agent de ce nouveau conflit mondial, je laisse aux historiens le soin de lui donner un nom ) A qui profite le crime , ( il y a du travail pour les chercheurs .... et pour les juristes et pour la justice . Il faudra du temps d'abord pour résister, puis pour reconstruire , comme disait Achille Van Acker, j'agis ( pour répondre au plus pressant et puis je pense pour préparer l'avenir ) . L'histoire est un éternel recommencement .
Il y a La covid. Mais heureusement elle n'est pas la seule au pouvoir. La vie continue , malgré elle . Dans 25 ans , on fera le bilan , je crains à 99 ans en 2046 de ne pas pouvoir le découvrir.